Prise en compte de la jurisprudence administrative pour les extensions en zone N du PLU

Le plan local d’urbanisme (PLU) de la ville d’Aix-en-Provence a imposé aux zones N une extension réduite à 40 m², et ce, quelle que soit l’année de construction du bâti pour lequel l’agrandissement est demandé, celui-ci à usage exclusif d’habitation. Or pour les bâtiments édifiés et ayant une existence légale avant la loi du 15 juin 1943, il est admis une augmentation de la surface jusqu’à 250 m². En outre, ledit PLU ne prévoit nullement l’éventuelle caducité de la jurisprudence ou de la réponse ministérielle antérieures à sa promulgation. Si à la différence des pays du common law la prise en compte de la jurisprudence n’est pas spontanée, celle-ci reste en droit français une source principale du droit administratif, droit dont dépend essentiellement l’urbanisme.

À l’heure actuelle, ce dernier n’a pas pris en compte les décisions suivantes en ce qui concerne les architectures dont la vocation est citée ci-dessus ayant une existence légale avant les dates susmentionnées : l’arrêt n° 04MA01976 de la cour administrative d’appel de Marseille, la réponse ministérielle n° 01976 de M. Jean-Louis Masson, publiée au JO du Sénat du 15 novembre 2012 et la décision du Conseil d’État n° 69852 du 19 février 1988, qui font jurisprudence en l’espèce et demeurent applicables aux zones N.

Le ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, a été interrogé sur les moyens de mise en œuvre et d’application pure et simple de ces jurisprudences et décisions.

Ce dernier rappelle qu’il découle d’une ordonnance n° 45-2542 du 27 octobre 1945 et de son décret d’application n° 46-1792 du 10 août 1946 que les constructions édifiées avant le 15 juin 1943 sont réputées légalement construites. Ces textes n’instaurent pas pour autant de droit spécifique à extension pour ces constructions.

L’arrêt du Conseil d’État du 19 février 1988 concerne l’application des dispositions d’un plan d’occupation des sols (POS), qui prévoyait la possibilité d’étendre une construction en zone ND afin d’en augmenter les conditions d’habitabilité dans la limite cumulée de 250 m², intégrant les constructions déjà existantes. Ces dispositions étaient d’application locale et ne portaient pas spécifiquement sur la question des constructions antérieures à 1943.

Le jugement de la cour administrative d’appel de Marseille du 9 juillet 2007 porte sur la reconnaissance de l’existence d’une construction édifiée en 1970. Le juge rappelle que seules les constructions existantes avant le 15 juin 1943 sont dispensées de la nécessité de produire un acte attestant de leur légalité. La construction ayant été érigée en 1970, elle ne pouvait prétendre à une telle dispense.

Enfin, la question écrite de M. Jean-Louis Masson rappelle qu’un acte notarié attestant de l’existence d’une construction depuis plus de trente ans ne suffit pas à prouver sa légalité.

Les constructions antérieures au 15 juin 1943 se voient donc appliquer les dispositions de droit commun prévues par le PLU en matière d’extension et d’annexe en zone N sans possibilité d’y déroger.

Le règlement du PLU d’Aix-en-Provence, dont la dernière révision a été approuvée le 18 octobre 2018, prévoit en zone N la possibilité, pour les bâtiments existants à destination d’habitation à la date d’approbation du PLU, sous réserve que ces derniers aient une surface de plancher minimale de 60 m2 et une existence légale :

  • d’une seule extension à usage d’habitation sur une même unité foncière dès lors que l’extension n’excède pas 40 m2 de surface de plancher sans être supérieure à 20 % de l’emprise au sol du bâtiment d’habitation principal existant ;
  • d’une seule construction à usage d’annexe sur une même unité foncière, détachée du bâtiment d’habitation principal, à condition qu’elle n’excède pas 30 m2 d’emprise au sol et ne soit pas constitutive de surface de plancher, tout point de l’annexe devant alors être implanté à moins de 20 m maximum mesurés à partir des murs extérieurs du bâtiment d’habitation principal et ne pas compromettre l’activité agricole ou la qualité paysagère du site.

Ces possibilités d’extension sont également encadrées par l’article L. 151-12 du Code de l’urbanisme qui ne prévoit aucun régime dérogatoire pour les constructions antérieures au 15 juin 1943 : « Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières et en dehors des secteurs mentionnés à l’article L. 151-13, les bâtiments d’habitation existants peuvent faire l’objet d’extensions ou d’annexes, dès lors que ces extensions ou annexes ne compromettent pas l’activité agricole ou la qualité paysagère du site. Le règlement précise la zone d’implantation et les conditions de hauteur, d’emprise et de densité de ces extensions ou annexes permettant d’assurer leur insertion dans l’environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. Les dispositions du règlement prévues au présent article sont soumises à l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du Code rural et de la pêche maritime ».

Le ministre ajoute qu’une extension de droit de 250 m2 serait difficilement conciliable avec les dispositions de cet article, notamment en ce qui concerne l’insertion dans l’environnement et la compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. Les constructions existantes à la date d’approbation du PLU, qu’elles soient antérieures ou non au 15 juin 1943, pourront donc bénéficier du droit à extension mesurée prévu dans la zone N du PLU.

Dans ce cadre, et en application de l’ordonnance de 1945 et du décret de 1946 précités, le pétitionnaire souhaitant étendre une habitation antérieure au 15 juin 1943 pourra attester par tout moyen que la construction à laquelle elle s’attache est antérieure à cette date sans qu’il ne puisse lui être demandé de produire une autorisation du droit des sols justifiant de sa légalité.

 

Rép. min. n° 17435 : JOAN, 2 juill. 2019, p. 6230, Laqhila M. – Rép min n° 01976 : JO Sénat 15 nov. 2012, p. 2607, Masson J.-L.

 

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