En 1985, la banque X. consent à la société S. un prêt destiné à financer l'acquisition d'un fonds de commerce, le remboursement de ce prêt étant garanti par un nantissement inscrit sur le fonds. Trois ans plus tard, la société S. cède le fonds de commerce à la société C., le prix étant séquestré entre les mains de M. X. En 1989, la société S. est mise en liquidation judiciaire et la procédure, après avoir été clôturée pour insuffisance d'actif, est reprise par jugement du 22 février 1993. La banque, après avoir déclaré sa créance le 6 avril 1993, demande que la société C. soit condamnée, en tant que tiers acquéreur du fonds, à lui payer les sommes dont elle restait créancière au titre du prêt. La cour d’appel rejette sa requête.
La banque X. attaque la décision des juges du fond exposant :
- que la société C., tiers acquéreur du fonds, se devait de respecter les formalités prescrites par l’article 22 de la loi du 17 mars 1909 pour se mettre à l’abri d’un éventuel droit de suite et qu’en s’abstenant d’ouvrir la procédure de purge des inscriptions pour permettre le règlement des créances privilégiées, cette société avait commis, à son préjudice, une faute d’autant plus caractérisée que le prêt stipulait que la société S. ne pouvait aliéner le fonds grevé sans obtenir l’accord préalable de la banque et qu’à la date de la cession cette société était toujours in bonis ;
- qu'en s'abstenant purement et simplement de répondre à ce moyen qui tendait à établir que, dans ces circonstances, la défaillance de la société C. quant à l'absence de purge des inscriptions la rendait personnellement responsable à son égard, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.
Appliquant strictement la loi de 1909, les Hauts magistrats approuvent les juges du fond : « la procédure de purge des inscriptions sur le fonds de commerce ayant pour but de permettre à l'acquéreur de se garantir des poursuites des créanciers inscrits, sa mise en oeuvre constitue une faculté dont l'acquéreur est, sauf fraude ou abus, libre de ne pas user, peu important qu'il ait connaissance des inscriptions grevant le fonds ». Le jugement précise également que « la cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions inopérantes par lesquelles la banque se bornait, sans alléguer ni fraude ni abus, à reprocher à l'acquéreur, informé de l'existence du nantissement, de n'avoir pas mis en oeuvre cette procédure » ;