Entrepreneur individuel habitant un immeuble appartenant à une société civile immobilière : même s’il est titulaire de parts de cette société, l’article L. 526-1 du Code de commerce ne peut s’appliquer

La loi du 1er août 2003 dispose, entre autres mesures, que les personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante ont la faculté de déclarer insaisissables leurs droits sur l'immeuble dans lequel est fixée leur résidence principale. Si on se réfère aux dispositions légales qui sont venues améliorer, en cas de décès du conjoint, le sort de l'autre conjoint survivant sur la résidence principale, on ne doute pas que la notion de résidence principale doit être interprétée dans le sens le plus protecteur des intéressés. Il semble pourtant que les conservateurs des hypothèques, qui sont en charge de la publication des déclarations d'insaisissabilité, soient particulièrement réticents à accepter des formalités faisant apparaître une société civile immobilière (SCI) à caractère familial, elle-même propriétaire de la résidence principale d'artisans, commerçants ou professions libérales. Dans ce cas d'ailleurs, on peut se demander si pour que la protection voulue par la loi soit réelle, ce ne sont pas à la fois les parts de la SCI et l'immeuble dont cette dernière est propriétaire, qui devraient être déclarés insaisissables. Or la publicité d'insaisissabilité de l'immeuble lui-même n'est pas en pratique admise par l'Administration et celle des parts qui devraient relever du greffe où la SCI est immatriculée, n'est pas envisagée et organisée par les textes. Ainsi, alors que le recours à la SCI est particulièrement fréquent, les personnes concernées ne bénéficient pas de la protection prévue par une loi qui leur est pourtant destinée sans restriction. Christian Jeanjean, député, demande donc au garde des Sceaux quelles instructions administratives pourraient être données aux conservateurs des hypothèques pour rétablir l'égalité dans l'importante population de chefs d'entreprises concernés et si la portée du texte de loi ne pourrait pas être précisée par décret pour ce qui concerne les parts de SCI.

En réponse, le garde des Sceaux précise que les articles L. 526-1 et L. 526-2 du Code de commerce permettent à « une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante de déclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ». Cette disposition qui a pour objet de permettre à un entrepreneur individuel de mettre à l'abri de l'action de ses créanciers professionnels sa résidence principale, déroge à la règle posée par les dispositions des articles 2092 et 2093 du Code civil. Elle doit donc être interprétée strictement. Les mots « ses droits sur l'immeuble » visent toute forme de droits réels immobiliers que l'entrepreneur peut avoir sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale, qu'il s'agisse d'un immeuble propre, indivis ou commun. Ainsi, la déclaration d'insaisissabilité portera soit sur l'immeuble propre soit sur l'immeuble commun, soit sur la quote-part indivise de l'immeuble lorsque celui-ci est en indivision. Lorsqu'une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale a établi sa résidence principale dans un immeuble appartenant à une société civile et qu'elle n'est titulaire que de parts sociales de cette société, elle ne peut pas bénéficier des dispositions des articles L. 526-1 et L. 526-2 susvisés. Les droits sociaux ne sont pas envisagés par l'article L. 526-1 du Code de commerce. Dans ce cas, seule la société civile immobilière est propriétaire des biens constituant l'actif social et dispose donc de droits réels sur ces biens. De surcroît, l'écran de la personnalité morale fait obstacle à la souscription de la déclaration d'insaisissabilité pour autrui. Les associés sont seulement titulaires de droits personnels concrétisés par l'attribution de parts sociales. Ainsi, ces droits ne confèrent aucun droit de propriété sur les biens composant l'actif social. Les associés n'ont pas en soi de droits sur l'immeuble composant l'actif social. Pour cette raison, les personnes détenant des parts sociales de sociétés civiles immobilières ne peuvent pas se prévaloir de l'insaisissabilité instituée par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 sur l'initiative économique. Les parts sociales d'une société civile immobilière pourront toujours être saisies dans les conditions prévues par la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 et le décret n° 92-755 du 31 juillet 1992.

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