L'exigence d'un chèque de banque n'a pas un caractère d'ordre public

Le 22 décembre 1995, la société N. vend le fonds de commerce dont elle est propriétaire, exploité dans des locaux commerciaux appartenant à M. Y., à la société R., aux termes d’un acte authentique reçu par Me X., notaire associé. Cette cession a lieu moyennant le prix de 650 000 F payable à concurrence de 200 000 F, le jour de la signature, le solde ayant été stipulé payable à terme, selon des modalités précisées audit acte. Le chèque de 250 000 F remis au notaire, le jour de la vente, se révèle sans provision, de même que les chèques suivants.

Après avoir obtenu la résolution judiciaire de la vente et la résiliation du bail de la société R., la société N. et M. Y. assignent la société civile professionnelle de notaire (la SCP) en responsabilité. Pour déclarer la SCP responsable à concurrence des 4/5èmes du dommage subi par la société N. et M. Y. et les indemniser, la cour d’appel retient :

- que le notaire, tenu de rechercher et de vérifier les conditions d'efficacité de l'acte à dresser, avait failli à ses obligations en régularisant la vente après avoir accepté de l'acquéreur un chèque du montant du premier versement prévu, payable comptant et quittancé par l'officier ministériel, alors qu'entre la date du compromis de vente et celle de la réitération authentique, il avait exigé de l'acquéreur le paiement de cette somme par un chèque de banque à son ordre, ce dont il est possible de déduire, au-delà des pratiques notariales en vigueur dans la région, que le notaire n'était pas certain de la solvabilité de l'acquéreur ;

- qu'ainsi, le notaire, outrepassant la recommandation de la chambre des notaires, rappelée dans une lettre de son président en date du 24 septembre 1996, avait commis une faute en acceptant d'instrumenter sans être couvert par un chèque de banque et en donnant quittance dans l'acte authentique.

La Cour de cassation censure cette décision d’appel qui a violé l'article 1382 du Code civil et l'article 3 de la loi du 25 ventôse an XI puisque, l'exigence d'un chèque de banque n'ayant pas un caractère d'ordre public, le notaire ne pouvait refuser d'instrumenter l'acte requis de lui.

Suivez en temps réel l'actualité defrénois

Recevez en temps réel, sur votre smartphone, votre tablette ou votre ordinateur, une notification de nos dernières actualités publiées sur le site