Aucun recours si la mère porteuse confie l’enfant au plus offrant

Deux hommes contractent une convention de gestation pour autrui, aux termes de laquelle leur cocontractante devait porter, contre rémunération, l’enfant qu’elle concevrait à l’aide du sperme de l’un ou de l’autre. Au cours de la grossesse, l’un d’eux reconnaît l’enfant puis, la mère porteuse indique au couple que celui-ci était décédé à la naissance. En apprenant qu’il était vivant et avait été reconnu par un homme, au foyer duquel il demeurait depuis sa naissance, l’un des deux hommes du couple porte plainte à l’encontre de la mère biologique pour escroquerie. Tous les quatre, (avec l’homme qui a reconnu l’enfant) sont condamnés pénalement. Il est établi, au cours de l’enquête pénale, d’une part, que celui du couple d’hommes qui n’a pas reconnu l’enfant au cours de la grossesse était son père biologique, d’autre part, que la mère porteuse avait décidé de confier l’enfant à naître à un autre couple, contre rémunération, sans faire état de l’existence de « l’insémination artisanale » à l’origine de sa grossesse et du couple auquel il était originairement destiné. Le père biologique assigne alors le père adoptif et la mère porteuse en contestation de la paternité du premier et en établissement de sa propre paternité sur l’enfant et demande le changement de nom du mineur, l’exercice exclusif de l’autorité parentale et la fixation de sa résidence chez lui.

D’abord, aux termes de l’article 16-7 du Code civil, toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle et, selon l’article 16-9 du même code, ces dispositions sont d’ordre public. La cour d’appel qui relève que l’action en contestation de la reconnaissance de paternité, destinée à permettre au demandeur d’établir sa propre filiation sur l’enfant, repose sur la convention de gestation pour autrui qu’il avait conclue avec la défenderesse, la cour d’appel de Rouen en déduit exactement que la demande est irrecevable comme reposant sur un contrat prohibé par la loi.

Ensuite, l’arrêt énonce que la réalité biologique n’apparaît pas une raison suffisante pour accueillir la demande, au regard du vécu de l’enfant, relève que celui-ci vit depuis sa naissance chez le défendeur, qui l’élève avec son épouse dans d’excellentes conditions, de sorte qu’il n’est pas de son intérêt supérieur de voir remettre en cause le lien de filiation avec celui-ci, ce qui ne préjudicie pas au droit de l’enfant de connaître la vérité sur ses origines et observe qu’il en est ainsi même si la façon dont ce lien de filiation a été établi par une fraude à la loi sur l’adoption n’est pas approuvée, et précise que le procureur de la République, seul habilité désormais à contester la reconnaissance de paternité a fait savoir qu’il n’entendait pas agir à cette fin.

Ainsi, mettant en balance les intérêts en présence, dont celui de l’enfant, qu’elle fait prévaloir, la cour d’appel ne méconnaît pas les exigences conventionnelles résultant de l’article 8 de la Conv. EDH.

Cass. 1re civ., 12 sept. 2019, n° 18-20472

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