Assurance sur la vie ou donation indirecte au bénéficiaire en présence d’une communauté universelle

Une veuve, qui avait été mariée sous un régime de séparation de biens transformé par les époux en communauté universelle, soutenant que son défunt époux avait diverti des fonds au profit d’une femme avec laquelle il entretenait une relation adultère, assigne cette dernière pour en obtenir la restitution.

Ne sont pas valables les libéralités consenties par un époux commun en biens au moyen de sommes provenant de ses gains et salaires lorsque ces sommes ont été économisées.

La cour d’appel de Paris relève que le défunt a remis à la défenderesse deux chèques de 120 000 € et 200 000 € tirés sur deux de ses comptes personnels, lesquels ont été alimentés par des virements provenant, pour le premier, du rachat d’un contrat d’assurance sur la vie, pour le second, de la liquidation d’un compte-titre ouvert au nom des deux époux. Il s’en déduit que même si certains de ces fonds provenaient de ses gains et salaires, ils étaient devenus des économies et ne constituaient donc plus des gains et salaires, de sorte qu’en application de l’article 1422 du Code civil, les donations ainsi consenties, sans l’accord de son épouse, doivent être annulées.

Selon l’article L. 132-9 du Code des assurances, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007, et l’article L. 132-21 du même code, ensemble l’article 894 du Code civil, en l’absence de renonciation expresse de sa part, le souscripteur d’un contrat d’assurance sur la vie mixte est fondé à exercer le droit de rachat prévu au contrat même en présence de bénéficiaires ayant accepté le bénéfice de ce contrat.

Pour requalifier en donations indirectes les contrats d’assurance sur la vie que le défunt a souscrit en désignant la défenderesse comme bénéficiaire, la cour d’appel énonce, d’abord, qu’un tel contrat peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné, révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable et que tel est le cas lorsque celui-ci a consenti à l’acceptation de sa désignation, dans la mesure où, en une telle hypothèse, il est alors privé de toute possibilité de rachat. Elle relève, ensuite, que le 28 septembre 2004, la bénéficiaire et le défunt ont signé une lettre par laquelle ils demandaient à l’assureur d’enregistrer l’accord de la bénéficiaire acceptante des contrats d’assurance et en déduit, enfin, que le défunt, ayant ainsi consenti à cette acceptation, il s’est dépouillé irrévocablement de sorte que les contrats doivent être requalifiés en donation indirecte.

En statuant ainsi, sans constater une renonciation expresse du défunt à l’exercice de son droit de rachat garanti par le contrat, la cour d’appel viole les textes susvisés.

 

Cass. 1re civ., 20 nov. 2019, n° 16-15867

 

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